Banderole
Première édition critique de L'Astrée d'Honoré d'Urfé
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Les Astrées posthumes


SignetLes Quatrièmes parties

Quelques fois les plus experts lapidaires sont trompez
de la belle apparance des pierres falsifiées.

Honoré d'Urfé,
Epistres morales, I, 1, p. 1.  

1 SignetLe lecteur de L'Astrée sait aujourd'hui que l'édition d'Hugues Vaganay n'est pas fiable : les éditions de base qu'il a choisies pour les trois premières parties et les leçons qu'il a données sont également défaillantes (Voir Vaganay). Pour les suites du roman, Vaganay, sans délibérer - ou du moins sans montrer l'ombre d'un doute - retient l'œuvre de Balthazar Baro. Il recopie donc La Vraye Astree de 1627 en l'appelant « Quatrième partie », mais il la prive de certains de ses liminaires (page de titre, privilège, et gravures). Vaganay considère que Baro aurait simplement complété l'édition de 1624 (V, p. 559). Peut-on le croire ? Balthazar Baro a-t-il gagné la partie ? Pas encore, ou du moins pas sur toute la ligne. Vaganay n'avait pas remarqué que Baro s'était emparé de La Sylvanire d'Honoré d'Urfé pour grossir son œuvre (Yon, p. 408). Vaganay n'avait pas remarqué que Baro proposait un roman d'aventures (Plazenet, p. 62). Vaganay n'avait pas remarqué que Baro avait bouleversé la chronologie pour que son Astrée se vende comme une suite de L'Astrée de 1624 (Henein, p. 887 η).

La question se pose donc : Quelle quatrième partie choisir pour rester fidèle à Honoré d'Urfé dans cette édition critique qui prétend rendre accessible une Astrée fiable et annotée ? « Mal pense qui ne repense » (Cotgrave, Article Penser). Les deux versions qui rivalisent ne sont pas parfaites. Il faudra trancher en faveur de celle qui présente le plus de chances d'être sortie de la plume du « vray historiographe de Lignon » - on reconnaît l'expression de Charles Sorel (p. 49).

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2 SignetLa Vraye Astree de 1627

Balthazar Baro, héros ou escroc ?

Ce jeune homme qui se présente en 1624 comme « Le François fol, Amoureux de soy-mesme, Monsieur Baro » (Cléosandre, p. 127) s'est distingué en 1620 par douze poèmes (Baro) parus dans le Second livre des Delices de la poesie françoise (pp. 361-376). En 1627, il intitule « La Vraye Astree » la suite qu'il donne au roman laissé inachevé par la mort d'Honoré d'Urfé en 1625. Il publie ensuite une Conclusion. Ces deux textes entrent en tant que « Quatrième » et « Cinquième » partie dans les éditions dite complètes en 1633 et en 1647. En 1636, Balthazar Baro est nommé à l'Académie française η, en grande partie à cause de son travail sur le roman d'Honoré d'Urfé. Son Astrée s'impose au XVIIe siècle - deux voix dissidentes seulement se font entendre, celle de Charles Sorel et celle de Gabriel Guéret η.

L'édition de 1627 s'ouvre sur une incongruité bibliographique puisqu'elle porte un Achevé d'imprimer daté du 5 novembre 1627, mais un privilège accordé le 20 novembre 1623 à un autre texte, « LA QUATRIESME PARTIE DE L'ASTRÉE DE MESSIRE HONORÉ D'URFÉ » (Voir Notes en images η). À la suite de complexes procès entre libraires-éditeurs (Koch), Balthazar Baro, avocat de formation, est devenu le maître de La Quatriesme partie de L'Astrée ; il reconfigure le texte mais écarte son titre. Il présente une suite de la troisième partie de L'Astrée, non de la quatrième.

L'analyse arborée de L'Astrée de Vaganay montre que l'œuvre de Baro, désignée par 4URF dans le schéma suivant (Voir URFEalii), ne s'écarte pas indûment des volumes qui l'ont précédée :

arbre_astree

3 SignetCette situation est due au fait que La Vraye Astree absorbe de vastes pans du corpus original.

95 % de la quatrième partie de 1624 et 98 % de la cinquième partie de 1625 se rejoignent en 1627 dans cette nouvelle mouture.

Baro a ajouté soixante-huit pages de son cru, « l'Histoire de Sylvanire » (1627, 3, pp. 181-249), soit 5% de la Vraye Astree. Or cette addition est une distorsion de La Sylvanire η d'Honoré d'Urfé : Bernard Yon, on l'a vu, a démonté le bricolage du plagiaire (Voir Concordances).

4 SignetBaro était-il mandaté par d'Urfé ?

Le titre choisi, La Vraye Astree, suggère que des doutes planaient sur les droits dont jouissait Balthazar Baro. En effet, l'adjectif provocateur suppose la réfutation de versions antérieures ou d'éventuelles infidélités. Dans l'Advertissement de cette Vraye Astree, en 1627, Baro plaide sa cause en accumulant des arguments qui s'imbriquent les uns dans les autres. Il se défend si farouchement qu'on l'imagine attaqué, ou du moins attaquable.

Argument 1 - Ami intime ?

Baro aurait été le confident d'Honoré d'Urfé. « Estant sur le poinct de rendre le dernier souspir », le romancier aurait ordonné « d'achever ce qu'il avoit entrepris » à celui à qui il avait « communiqué (son) dessein ». En 1628 encore, dans la Conclusion, Baro évoque « feu Mon Maistre » (« Au Lecteur », n.p.).
Et pourtant ... lorsque Baro, en 1619, ajoute une « Ode à la rivière de Lignon η » au cœur des feuillets liminaires de la troisième partie de L'Astrée, il n'évoque pas les relations qu'il entretenait avec d'Urfé. Il ne se présente pas comme « secrétaire » du romancier. En 1624, Olivier Patru rencontre Honoré d'Urfé à Turin et l'interroge sur son roman. Il ne dit rien des relations du romancier et de Baro dans ses « Éclaircissemens sur l'histoire de L'Astrée ». 

Trois témoignages cautionnent les dires de Baro, celui de Pellisson, celui de Huet et celui de Boileau. Or les trois hommes répètent ce que le principal intéressé a dit ou écrit ; ils se soutiennent les uns les autres. Pellisson, dans l'Histoire de l'Académie française, traite Baro de « secrétaire » d'Honoré d'Urfé puisqu'il reprend des renseignements communiqués par ce même Baro, son collègue (I, pp. 237-238). Dans sa Lettre à Mlle de Scudéry, Daniel Huet embellit considérablement les relations de Balthazar Baro avec d'Urfé : le continuateur aurait été « instruit [...] par un attachement intime de plusieurs années, de tout le dessein de son ouvrage » (p. 858). Huet pense rapporter ce que lui a confié le neveu du romancier, Charles-Emmanuel d'Urfé η. En fait, il répète l'Advertissement écrit par Baro lui-même en 1627. Nicolas Boileau, dans le Dialogue des Héros de roman, se fait l'écho de ces informations viciées à la base : Baro serait l'« ami » ou le « domestique » de d'Urfé (p. 284). Longtemps, nul ne songera à douter de la parole du « Régent du Parnasse ». Ainsi s'établit une réputation ...

Une fois posé que « l'attachement intime » de Balthazar Baro et d'Honoré d'Urfé n'est confirmé par aucun témoignage impartial, on doit chercher ailleurs des preuves de la fidélité de La Vraye Astree et de la probité de son auteur.

Argument 2 - Mandaté par d'Urfé ?

« Estant sur le poinct de rendre le dernier souspir » ... Baro se corrige dès la phrase suivante : c'est la nièce du romancier qui aurait, en réalité, transmis le « commandement » du mourant. Cette nièce d'Honoré d'Urfé, Gabrielle η, a fait publier la première des suites, celle dont Baro adopte le privilège, celle qu'il veut supplanter. Mais cela, l'Advertissement choisit de ne pas l'expliquer.

Argument 3 - Mandaté par la belle-fille du Duc de Savoie ?

Baro juge nécessaire de renchérir : la nièce d'Honoré d'Urfé aurait reçu un ordre de la princesse Chrétienne (ou Christine) de France η, l'épouse de Victor-Amédée de Savoie η.

Argument 4 - Manuscrit du Duc de Savoie η ?

Le Duc aurait possédé « l'original de cette Quatriesme, d'où ce qui a esté mis de Monsieur d'Urfé dans la cinquiesme et sixiesme Partie, avoit esté malicieusement soustrait », lit-on dans l'Advertissement. Cette information repose sur une terre minée ; Baro, très probablement, l'ignorait.

L'existence d'une quatrième partie complète est une invraisemblance que j'ai relevée ailleurs (Choix). Le 10 mars 1625, les trois premières parties de L'Astrée attendent encore la publication d'une suite. Honoré d'Urfé promet aux « parfaits amants » de continuer son roman. Cette quatrième partie serait-elle prête trois mois plus tard, le 1er juin 1625, alors que d'Urfé, avant de rendre l'âme, participait à la bataille de la Valteline η depuis le mois d'avril ?

Invraisemblance aussi quand Baro prétend que le duc de Savoie η aurait offert à Jacques d'Urfé η un manuscrit du roman. Les frères d'Urfé servaient le duc, mais n'avaient pas d'excellentes relations avec lui. À en croire le Testament d'Honoré d'Urfé, « 8 000 écus pour ses appointements » ne lui avaient pas été versés. Le romancier ne dédie au duc aucune des parties de L'Astrée. Lorsque paraît la troisième partie, en 1619, d'Urfé vient d'être nommé chevalier de l'Annonciade η par le duc de Savoie η. L'Astrée est pourtant dédiée à Louis XIII. Dans ces conditions, pourquoi Honoré d'Urfé aurait-il confié au Duc le manuscrit de sa quatrième partie ? De plus, si Christine de France η, la belle-fille du Duc, était intervenue lorsque les documents ont changé de mains, est-ce que la courtoisie la plus élémentaire ne voulait pas que La Vraye Astree soit dédiée à un membre de la maison de Savoie ? Balthazar Baro dédie son travail à Marie de Médicis η.

Le Duc η aurait-il désiré favoriser le frère aîné d'Honoré ? Des documents d'archives nous apprennent que Jacques a quitté la Savoie entre 1625 et 1630, alors qu'il était en mauvais termes avec son maître (Généalogie). Le Duc η, en 1626, a repris Sommerive η à Jacques η, son ancien amiral, tout en lui réclamant de fortes sommes d'argent (Archives de Savoie, FRAD73-4B1049, vue 14b). Le marquis d'Urfé renonce à la Cour et plaide contre le Duc η. Tout indique qu'il s'est retiré en Forez où il s'est effacé puisqu'il a même cédé son titre de bailli à son fils aîné.

On aura noté que les arguments empilés dans les liminaires des deux volumes de Balthazar Baro ne mentionnent pas les procès qui ont entouré L'Astrée. Les archives étudiées par Paule Koch ont consigné des conflits ou des témoignages que le continuateur préfère ne pas rappeler. Il n'est pas impossible que Baro et ses éditeurs aient voulu dissimuler des chicanes qui assombrissent l'histoire de L'Astrée.

5 SignetBaro a-t-il été un bon éditeur ?

Bien que l'existence d'un manuscrit authentique et complet de la quatrième partie soit un leurre, bien que les relations de Balthazar Baro avec Honoré d'Urfé soient problématiques, La Vraye Astree de 1627 pourrait passer pour une bonne réédition de la quatrième partie de 1624. Baro reconnaît dans la dédicace à Marie de Médicis η qu'il a fait essentiellement un travail de rapiéçage :

Il y a quelque temps que la France ne la void que sous un habit deschiré par lambeaux, et sous un visage capable de faire mourir d'horreur ceux qui n'auroient pas accoustumé de voir des Monstres (1627, n.p.).

Ces « lambeaux » pourtant se métamorphosent vite. En 1628, ils s'avèrent être le « manuscript mesme » d'Honoré d'Urfé - sous la baguette de Baro :

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Conclusion, Paris, A. de Sommaville, 1647.
Bibliothèque municipale de Lyon. Google.

L'inflation est aussi évidente qu'inquiétante. Il faut donc examiner l'œuvre de Baro sous l'angle de ses qualités intrinsèques puis souligner son degré de fidélité à ce qu'on sait du roman d'Honoré d'Urfé.

6 SignetLes Qualités de La Vraye Astree

Je reconnais quelques mérites à la version de Baro en 1627. Elle offre douze η livres comme les trois premières parties de L'Astrée. Sans le dire clairement, elle réunit les œuvres laissées en souffrance par leur auteur, c'est-à-dire les trois brouillons publiés sans son consentement en 1624, 1625 et 1626, ainsi que l'infortunée Sylvanire η. Quelques-unes des inconsistances qu'on y rencontre proviennent sans doute de contradictions qui se trouvent dans les brouillons, particulièrement en ce qui concerne la cinquième partie de 1625.

Comme le continuateur n'appartient ni à la même génération (Répertoire), ni à la même classe sociale, ni à la même famille d'esprits que l'auteur original, La Vraye Astree pourrait ouvrir une fenêtre sur l'évolution de la langue. 
La version de Baro supprime les fautes les plus gênantes des éditions antérieures - je l'indique dans les Notes. Elle corrige par exemple les noms propres de 1624, et elle rétablit la ponctuation. Elle place mieux les pronoms personnels et supprime nombre de tournures fautives. Le continuateur pourtant n'essaie pas de bannir les répétitions. Ses corrections deviennent de moins en moins nombreuses au fil des pages (Voir par exemple le cas de l'accord du verbe et du sujet η). Aucune d'ailleurs ne semble systématique. La quatrième partie ne sort pas rajeunie, mais tout juste, parfois, plus facile à lire.

7 La Fidélité de La Vraye Astree

L'auteur de la Vraye Astree agit-il en éditeur scrupuleux qui prend des initiatives fructueuses ? Les remaniements sont « considérables », comme le relève Mme Sancier (p. 382), et la défiguration du travail original d'Honoré d'Urfé se fait en profondeur. Le premier livre de 1627 est un parfait révélateur, et les épisodes sacrifiés par Baro indiquent les priorités du continuateur. Une lecture attentive révèle de malencontreuses additions et des suppressions désastreuses. La transformation que subit la quatrième partie de 1624 fait ressortir - a contrario - ce que L'Astrée d'Honoré d'Urfé a d'unique.

L'espace et le temps subissent des traitements opposés : Balthazar Baro ne modifie pas les descriptions de lieux. La grande allée conserve les mêmes caractéristiques (1624, IV, 1, 96 ; 1627, 2, p. 114). Le nouvel arrivant contemple toujours le Forez de haut et de loin (1624, IV, 4, 910-911 ; 1627, 7, pp. 709-10). En revanche, le continuateur modifie la chronologie à coups de ciseaux - il retranche et déplace sans se soucier de cohérence. Pensait-il déjà à sa Conclusion ? Rien ne l'indique. Souvent, il ajoute des détails matériels aussi vraisemblables que superflus : Léonide tient une bougie près de Galathée (1627, 1, p. 8) et Climanthe ferme la porte en s'en allant (1627, 1, pp. 29-30). Baro a du mal à jongler avec les épisodes, et en particulier à raccorder les différentes parties. On a vu qu'il avait transformé la fin de 1624 en début de 1627. Il remplace Adamas par le dieu Amour pour réunir la quatrième partie de 1624 avec la cinquième partie de 1625 (1625, 5, p. 418 ; 1627, 1, p. 41).

8 SignetLe Livre 1 de La Vraye Astree

En 1627, le premier livre est sans aucun doute celui qui a requis le plus d'efforts. Le continuateur vise alors trois buts distincts :

- donner aux lecteurs l'impression de lire une suite de la quatrième partie de 1624 (l'action se déroule donc à Marcilly),
- reprendre les grands moments de cette édition de 1624 qui est destinée à disparaître (la matinée qu'Astrée et Alexis passent au lit par exemple),
- s'emparer de la cinquième partie de 1625, et en particulier de la méditation de Diane, un de ses plus beaux passages : le lecteur de La Vraye Astree découvre rapidement des textes qu'il n'a pas vus dans L'Astrée de 1624.

Balthazar Baro, dans ce premier livre, adopte longuement le point de vue de Galathée pour expliquer les états d'âme de la nymphe - et surtout pour amender sa réputation. À en croire le continuateur, les agissements de Polémas rapprocheraient la nymphe de Lindamor et l'éloigneraient de Céladon. En même temps, Baro se montre indulgent pour le chevalier traître. On lit en 1624 : « Cette trahison [...] inventee par ce meschant homme de Polemas » (IV, 5, 924). Chez le continuateur, la notation (1627, 1, p. 12) est précédée par un développement qui condamne moins sévèrement la hardiesse du chevalier (1627, 1, p. 2). Les quelques lignes de la quatrième partie de 1624 deviennent plusieurs pages en 1627. Baro brode.

Ces changements à eux seuls auraient suffi à rendre La Vraye Astree suspecte. Mais il y a pire puisque Baro barre.

9Signet Soustraction et censure

Le continuateur supprime l'ouverture érotique de 1624, c'est-à-dire à peu près les douze premières pages. « Passionné Berger », « sein plus blanc que neige », « nonchalance », « expedient », « toute sorte de familiarité », tout cela disparaît. Baro retranche même avancer « dextrement l'execution de son entreprise » (IV, 1, 7). La conversation d'Astrée et d'Alexis, rapportée plus loin (1627, 1, p. 45), comprend des termes moins lestes. Des détails amusants rendent alors la scène moins voluptueuse : « Il luy mit et remit deux ou trois fois à rebours les manches de cette robe, devant que la luy donner comme il falloit » (1627, 1, p. 51). Par conséquent, évidemment, l'évolution des relations des héros, les étapes de l'asag η, perdent de leur acuité.

Baro est aussi choqué par les confidences de Dorinde dans la quatrième partie. À la suite d'un dialogue avec le prince Sigismond qui lui déclare qu'il l'aime mais qu'il ne peut pas l'épouser, la jeune femme note : « Il fallut que je consentisse à tout ce qu'il voulust » (IV, 4, 880). Baro rejette les sous-entendus ambigus. Il les remplace par une observation anodine : « Nos discours furent longs sur ce sujet, mais enfin nous resolumes [...] » (1627, 7, p. 800). La coquette ambitieuse s'assagit.

C'est encore pour respecter les convenances que Baro soustrait un épisode qui constitue un élément structurel significatif de la quatrième partie authentique (IV, 4, 711-713). La danse des sauvages η qu'il élimine (1627, 7, 606) est un ballet chanté où costumes et vers se complètent et illuminent la personnalité de la narratrice de l'épisode. Honoré d'Urfé se plaît à décrire ce genre de déguisements ludiques hautement symboliques, joyaux d'un art baroque (Henein, pp. 233-239). À cheval sur le protocole, Baro décrète que ce déguisement infamant donne une image inacceptable des chevaliers (Henein, pp. 889-890). Il retranche l'épisode et les vers. Le continuateur impose au roman sa conception étroite de la bienséance, « la moindre de toutes les lois, et la plus suivie », expliquera La Rochefoucauld (447, p. 466).

Celui qui vante l'aristocratie et se montre pudibond affiche une échelle des valeurs éminemment bourgeoise. J'aurais dit que le continuateur était snob si ce mot existait alors. Balthazar Baro est le « bourgeois gentilhomme » du roman. C'est dire que La Vraye Astree ne peut pas prétendre offrir une valeur ajoutée à la quatrième partie de 1624. Tout au plus, elle complète le texte original avec des « lambeaux » (1627, Advertissement) pris dans les brouillons de 1625 et de 1626.

10Signet Évaluation de La Vraye Astree

Tout compte fait, Baro n'apporte pas une version bonifiée de la quatrième partie de 1624. Il ne présente pas non plus une suite valide de L'Astrée d'Honoré d'Urfé. Les manipulations qui s'étalent dans le premier livre de la version de 1627 contrarient le lecteur qui espérait lire une prolongation légitime. Le traitement de La Sylvanire lui enlève ses illusions et l'inquiète. Les passages censurés le scandalisent et l'absence de corrections substantielles et bénéfiques anéantissent ses espoirs. Non seulement la prétendue Vraye Astree n'est certainement pas la mythique quatrième partie complète et inattaquable, mais encore elle s'avère l'entreprise d'un continuateur déloyal auteur d'une restauration maladroite.

Celuy, Madame, qui dit quelque chose qui n'est pas vraye, ne peut pas estre dit menteur, s'il pense toutesfois dire vray, car j'ay tousjours ouy dire que, pour encourir ce blasme, il faut non seulement dire un mensonge, mais sçavoir bien encore qu'on ment (1627, 11, p. 1124).

En m'appuyant sur une maxime que Baro a recopiée de L'Astrée (1625, V, 6, 585) et qui vient de saint Augustin η, j'affirme que le continuateur de L'Astrée est un menteur : il dit un mensonge et il sait qu'il ment. Je partage donc l'opinion de Laurence Plazenet : « La Vraye Astree est loin d’être parfaitement authentique ni de pouvoir servir d’édition de référence » (p. 64).

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11 SignetLa Quatriesme partie de 1624

Volée, publiée, délayée

Le manuscrit de la quatrième partie n'a pas eu de chance : il a été dérobé par Gabrielle η d'Urfé, et puis, en 1627, déguisé dans La Vraye Astree par Balthazar Baro. L'Astrée de 1624, de toute évidence, est une suite incomplète. Elle s'arrête au début du cinquième livre et se termine par des mots inusités qui soulignent son inachèvement.

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Il s'agit d'un brouillon d'Honoré d'Urfé. Pour autant qu'on sache, personne ne l'a jamais modifié. Quelques maladresses linguistiques prouvent même que le romancier n'a pas relu son texte. Comment expliquer, par exemple, ces métaphores qui s'agglutinent inconsidérément quand des maris tyrans deviennent les « bourreaux de la tyrannie des hommes » (IV, 2, 234) ?

12 SignetCe qui surprend

La quatrième partie de 1624 ne ressemble pas à celles qui l'ont précédée à cause des agencements qui lui manquent, des développements qui ne modifient pas la dynamique du récit.
Alexis ne prononce pas un seul vers. Le héros a pourtant soupiré vingt-deux poèmes dans les trois premières parties. Il n'est plus jamais question des « plus savants » que citait Silvandre. Le décor mythologique s'affaiblit. Le quatuor divin celte s'efface. Mercure et Pan disparaissent. Certains personnages passent sans hésitation d'un dieu gréco-romain à une divinité celte : le prince Sigismond, en parlant à la même personne et du même sujet, jure par Hercule (IV, 4, 818) puis par Tautatès (IV, 4, 823). Seul Calidon le lâche avait fait la même chose auparavant (II, 11, 706).

Le cadre gaulois s'effrite. La religion perd de sa cohérence. Des druides hantent la cour de Gondebaud (IV, 2, 233) tandis que des bergers foréziens vont se rendre, en toute connaissance de cause, dans un temple de Jupiter (IV, 3, 472). Par voie de conséquence, la chronologie du roman s'affaiblit puisqu'elle se basait sur la liturgie et sur les cycles de la lune. D'Urfé semble oublier que le sacrifice du gui sacré devait avoir lieu le sixième de la lune de juillet (III, 6, 260 recto) et que la lune déjà était pleine (III, 10, 430 verso). On nous rappelle seulement que le sixième de la lune de juillet pouvait tomber « bien avant dans le mois d'Aoust » (IV, 2, 271). Et cependant la quatrième partie multiplie les liens temporels avec les aventures passées - procédé que d'Urfé chérit. La durée même des cinq livres est clairement indiquée par le déplacement de Léonide qui va du hameau à Marcilly (IV, 1, 1 à IV, 5, 918). On s'étonne pourtant que Galathée attende trois jours pour échanger des confidences avec Léonide. Le romancier devait encore accorder les séquences.

La condition pastorale, dans la quatrième partie de 1624, regagne le terrain qu'elle avait perdu dans la troisième. Troupeaux et brebis surgissent plus souvent au premier plan. Il est toutefois curieux que les bergers fassent « des assemblees generales dans la forest d'Issoure » (IV, 3, 383), un domaine princier. Il est bizarre aussi de voir surgir Clindor. Ce transfuge installé à Marcilly rappelle les infortunes d'Alcippe lorsque ce berger, renégat, avait cessé d'observer « religieusement le serment de ses Ancestres » (IV, 3, 486). Il est surprenant que le romancier n'habille pas en bergers les deux frères amoureux qui surviennent dans le hameau (IV, 3, 499) et discutent avec Silvandre et Hylas. L'éloge du Forez semble moins éclatant en 1624, car le séjour de rêve passe maintenant pour un endroit sûr ou une résidence provisoire à laquelle il faut s'adapter (IV, 1, 65). La condition des hameaux est-elle destinée à évoluer de cette manière ?

À mes yeux, la principale faiblesse de la quatrième partie inachevée, c'est l'épisode de la marque que porte Silvandre (IV, 2, 163). Les invraisemblances criantes s'enchaînent, comme je l'explique dans une note η. Tout, dans ces quelques pages, sous-estime l'esprit du jeune homme et surestime la crédulité bienveillante du lecteur. Honoré d'Urfé devait sûrement harmoniser l'aventure de la tache de naissance avec ce que nous savons de ce jeune homme victime de la jalousie d'une Diane. Baro n'a pas jugé utile de corriger ces défaillances.

La quatrième partie de 1624 est une Astrée en devenir. C'est d'ailleurs un de ses atouts : nous voyons Honoré d'Urfé à l'œuvre. Il pose les assises du récit et favorise certaines situations clés. Agencements et ajustements devaient s'ajouter plus tard η.

13 SignetCe qui rassure

Le romancier déploie ses talents même dans ce roman amputé. Non seulement il maîtrise parfaitement la chronologie, comme on l'a vu plus haut, mais encore il prolonge habilement le curieux mouvement de balancier qui réunit les deux couples principaux. D'Urfé veut que les amours de Céladon et celles de Silvandre évoluent en sens contraire : quand l'un est favorisé l'autre est disgracié. Le romancier conserve aussi le subtil parallèle entre le destin de Diane et celui d'Astrée. Ici, c'est un acte irréfléchi que les bergères tiennent secret qui les rapproche. Astrée n'a jamais répété à ses amis le cruel commandement η donné à Céladon. Diane cache qu'elle a permis à Paris de demander sa main (IV, 3, 632). De ces cachotteries féminines naissent le drame et ses séquelles. Balthazar Baro ne l'a pas compris ; il supprime toute référence à l'oubli de Diane (1627, 6, p. 461).

Ce qu'il y a de plus typiquement urféen dans L'Astrée de 1624, ce sont les aventures qui semblent répétitives, mais qui ne le sont pas. Bien qu'elles appartiennent effectivement à des séries, de subtiles différences les distinguent. Je veux parler du songe d'Astrée, le cinquième dans la lignée onirique η du roman, et de l'oracle de Silvandre, le quatrième que reçoive ce jeune homme favorisé des dieux η. Un épisode éminemment romanesque, topos confirmé, se ravive en 1624 : la lettre trouvée prend la forme d'un poème écrit sur un papier qui tombe d'une poche. Alors que le sonnet de Silvandre suscite l'admiration (IV, 3, 520), les vers de Sigismond révèlent un secret mortel (IV, 4, 790).

Ce qu'il y a de plus prometteur dans les livres de 1624, ce sont les nouvelles couleurs de l'amour que d'Urfé imagine à travers les relations de plus en plus intimes d'Astrée et d'Alexis, à travers les nombreux déboires affectifs de Dorinde, à travers la passion impudente de Sigismond et à travers la lucidité imprévue d'Amilcar. L'amant jouit du nom et des prérogatives de la « maîtresse » (IV, 1, 34). Les présents d'un prétendant ne sont plus dons gracieux, mais paiements (IV, 2, 312). À l'amour inclination (II, 4, 187) se joint l'amour « penchant de glace » (IV, 4, 824-825). L'amour de soi η ose dire son nom et s'imposer sans contestation (IV, 3, 509). Le romanesque devient-il plus cynique ?

Jusqu'ici, dans L'Astrée, l'histoire des couples non foréziens se racontait à deux voix. En 1624, Dorinde parle seule - et accapare près de la moitié de la quatrième partie. Ce déséquilibre, évidemment, provient de l'inachèvement. Il n'en reste pas moins que l'histoire intercalée historique que présente Dorinde, comme celles qui l'ont précédée, expose le danger des amours des princes : Gondebaud, amoureux évincé, et Sigismond, aveuglé par la passion, figurent un péril décuplé. Honoré d'Urfé nous tient en suspens.

Je pourrais poursuivre l'analyse de la composition prometteuse de la quatrième partie de 1624. Mais est-ce bien nécessaire ? Ceux qui l'ont lue n'ignorent pas ses mérites. Bien qu'inachevée, elle renferme tous les éléments qui caractérisent L'Astrée authentique, même si son auteur n'a pas encore orné ses phrases et sa pensée. Balthazar Baro ne l'a pas compris.

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14 SignetHonoré d'Urfé n'a pas eu la chance d'avoir son Jean Galland ou même son Colletet pour écrire sa biographie, publier ses manuscrits, contrôler les éditions de ses œuvres. Balthazar Baro s'est occupé uniquement des suites de L'Astrée, et seulement pendant trois ans. Paule Koch, en fondant sa conclusion sur des archives administratives et sur la description d'éditions posthumes, considère qu'il sera « difficile de contester l'authenticité de la quatrième partie de L'Astrée » due à Baro (p. 396). Ce n'est pas le cas. Deux impostures majeures donnent un poids factice à La Vraye Astree : le mirage d'une quatrième partie manuscrite authentique et complète et le titre usurpé de « secrétaire » du romancier. Il est impossible de considérer l'œuvre de Baro comme une bonne édition d'un texte d'Honoré d'Urfé : déplacements, additions et soustractions sont inacceptables. Bien qu'inachevée, l'édition de 1624 est incontestablement plus fidèle à l'esprit et à la manière d'Honoré d'Urfé.

La numérisation des catalogues d'un grand nombre de bibliothèques a révélé la survie de plusieurs exemplaires des trois suites originales de L'Astrée, je veux dire celles de 1624, de 1625 et de 1626. Elles ont bel et bien dû se vendre pendant des années.

Beaucoup de grandes bibliothèques européennes ont des collections de l'Astrée où, à la suite des trois premières parties complètes, se retrouvent la Quatrième partie incomplète de 1624 et les Cinquième Partie et Sixième Partie publiées en 1625 et 1626 par Robert Fouet η
(Yon, Introduction, Sixiesme partie, pp. 8-9).

La critique littéraire, en favorisant plutôt les éditions dites complètes de L'Astrée, a préféré monter aux nues l'œuvre de Balthazar Baro et enterrer ses rivales. Laisser la place d'honneur à la pseudo Vraye Astree et à sa Conclusion, c'est bafouer L'Astrée authentique. Deux visages de L'Astrée rend à Honoré d’Urfé ce qui lui est dû en restaurant les prolongations authentiques de L'Astrée. Je ne déplore pas tant ce que Baro a fait que ce qu'on a fait de Baro.

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SignetAnnexes

15 Concordances
Table des histoires intercalées
dans les suites de L'Astrée

Les couleurs font ressortir les livres qui n'appartiennent pas à L'Astrée d'Honoré d'Urfé. La quatrième partie de 1624 seule jouit d'hyperliens.

Livre 1
IV, 1, 1
« La Nymphe Léonide était à peine hors de la maison du vénérable Phocion »
    Livre 1
« Depuis que Galathée, par la violence d'une extréme jalousie, avoit esloigné de sa presence la Nymphe Leonide »
Livre 2
IV, 2 174.
[Diane] « s'étant enfoncée promptement dans le bois, elle revint auprès du lieu où ils étaient si doucement qu'elle ne fut aperçue de personne »
    Livre 2, 75
« Diane cependant qui estoit dans le buisson prochain »
      Livre 3, 181 à 249
Histoire de Silvanire
« Puis qu'il vous plaist, mon Pere, que ce soit moy »
Livre 2
IV, 2, 228
Histoire de Dorinde, de Periandre, de Merindor et de Bellimarte
« C'est avec beaucoup de raison »
    Livre 4, 255
Histoire de Dorinde, de Periandre, de Merindor et de Bellimarte
« C'est avecque beaucoup de raison »
Livre 3
IV, 3, 403
« En mesme temps toute la compagnie se separa »
    Livre 5
« En mesme temps toute la compagnie se separa »
  Livre 3, 376
Histoire de Delphire et de Dorisée
  Livre 6, 469
Histoire de Delphire et de Dorisée
« Si ceux qui ont parlé de la jalousie »
Livre 4
IV, 4, 638.
Histoire de Dorinde, du Roy Gondebaut et du Prince Sigismond
« Il y a des personnes, ô mes cheres compagnes »
Livre 4, 604
Histoire de Parisatis et de Zenobias,
œuvre de Gomberville.
  Livre 7, 570
Histoire de Dorinde, du roy Gondebaut, et du prince Sigismond
« Il y a des personnes, ô mes cheres compagnes »
  Livre 1, 1
« Parce qu'Adamas craignant quelque surprise de Polemas »
  Livre 8, 712
« Parce qu'Adamas craignant quelque surprise de Polemas »
  Livre 1, 21
Suitte de l'histoire de Dorinde
« Si les grands Princes estoient exempts des passions »
  Livre 8, 726
Suitte de l'histoire de Dorinde
« Si les grands Princes estoient exempts des passions »
  Livre 2, 80
Histoire d'Alcandre, d'Amilcar, Circène, Palinice et Florice
« Quelques-uns soutiennent que l'Amour ne vient pas de sympathie »
  Livre 9, 801
Histoire d'Alcandre, d'Amilcar, Circène, Palinice et Florice
« Quelques-uns soustiennent que l'amour ne vient pas de sympathie »
  Livre 5, 424
Histoire de Rosanire, Celiodante et Rosileon

« La patience, et l'impetuosité, sont deux moyens »
  Livre 10, 936
Histoire de Rosanire, Celiodante et Rosileon
« La patience et l'impetuosité sont deux moyens »
  Livre 6, 585
Suitte de l'histoire de Ligdamon
« Celuy, Madame, qui dit quelque chose qui n'est pas vraye »
  Livre 11, 1124
Suitte de l'histoire de Ligdamon
« Celuy, Madame, qui dit quelque chose qui n'est pas vraye »
    Livre 1, 1
« Amasis, ny Adamas, parmy tous ces disvertissemens, ne perdirent pas le souvenir »
Livre 11, 1174
« Amasis, ny Adamas, parmy tous ces disvertissemens, ne perdirent pas le souvenir »
    Livre 1, 71
Suitte de l'histoire de Dorinde et du prince Sigismond
« Soudain que Leontidas fut entré »
Livre 11, 1219
Suitte de l'histoire de Dorinde et du prince Sigismond
« Soudain que Leontidas fut entré »
    Livre 2, 124
Suitte de l'histoire de Lidias
« Estant donc appuyée sur cette fenestre »
Livre 12, 1252
Suitte de l'histoire de Lydias
« Estant donc appuyée sur cette fenestre »
    Livre 2, 151
Suitte de l'histoire de Melandre.
« Tu me demandes ingrat et perfide Lydias »
Livre 12, 1271
Suitte de l'histoire de Melandre
« Tu me demandes ingrat et perfide Lydias »
    Livre 2, 181
Suitte de l'histoire de Lipandas
« Ceux qui ne cognoissent point la grandeur et la puissance »
Livre 12, 1291
Suitte de l'histoire de Lipandas
« Ceux qui ne cognoissent point la grandeur et la puissance »

16 SignetVaria

Baro ne traite pas la Cinquième partie de 1625 avec plus d'égards que la quatrième partie de 1624. Deux modifications intempestives prouvent combien le continuateur iconoclaste ne s'astreint nullement à la fidélité. Les textes cités figurent au cœur du livre 1 de 1627.

Le sort d'Alexis - 1625, 4, p. 417 / 1627, 1, p. 48.

Entre le quatrième et le cinquième livre de L'Astrée originale, Baro introduit quelques lignes pour rappeler la situation d'Alexis. Sous sa plume, l'analyse des soupirs de la feinte druide frise le ridicule. On lit en 1627 : « Toutesfois, il me semble que ce sont plustost souspirs d'une personne souciée, que non pas de malade ; car ceux qui procedent de maladie sont plus semblables à une violente respiration, que non pas aux souspirs ordinaires que la passion » (1627, 1, p. 48). Ailleurs, Baro attribue au berger une vertu que d'Urfé ignore, la « prudente ignorance » (1627, 1, p. 44). Il lui permet aussi d'appeler Astrée et ses compagnes « Mes belles filles » (1627, 1, p. 49), formule triviale et déplacée.

Le sort de Diane - 1625, 3, p. 189 / 1627, 1, pp. 64-65.

La méditation de Diane survient dans le troisième livre de la cinquième partie, où elle est entourée de nombreux guillemets d'attention (1625, 3, p. 189). Baro la déplace et l'installe au moment où, dans la quatrième partie de 1624, Diane, « se voulant assoir sur le bord de la riviere », entend Dorinde chanter (IV, 1, 37).
Honoré d'Urfé, en 1625, situait la rencontre des jeunes filles « hier ». Baro, lui, prend la liberté de raconter le monologue de Diane avant de réconcilier la bergère avec Silvandre. Ce changement est tout à fait regrettable : le continuateur escamote la jalousie aveugle et la fureur rentrée de la bergère pour les remplacer par la réflexion philosophique d'une jeune fille posée. La tirade perd aussi de sa vraisemblance en perdant son statut de confidence ; en 1625, Diane elle-même rapportait son expérience à ses compagnes.